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Festival de La Rochelle: le choc « Laetitia »

 

Source : Le Figaro

 

Heureusement pour eux, les festivaliers avaient fait le plein de comédies plus tôt dans la journée de vendredi avec Mytho ou Une Belle famille . Car le point d’orgue de cette journée, par ailleurs extraordinairement ensoleillée, était bien la diffusion des premiers épisodes de Laetitia. Pour France 3, le cinéaste oscarisé Jean-Xavier de Lestrade a adapté l’enquête et essai d’Ivan Jablonka sur l’affaire Laetitia Perrais, Laetitia ou la fin des hommes . La disparition de l’adolescente en 2011 avait massivement mobilisé les forces de l’ordre, horrifié les Français et fait réagir jusqu’à l’Élysée. Son meurtrier, Tony Meilhon, avait mis plusieurs semaines à révéler ce qu’il avait fait du corps démembré de sa victime.

 

Au fil des quatre épisodes, le réalisateur de 3 x Manon et de Jeux d’Influence décortique le rôle des institutions sociales et judiciaires et met à jour la violence sous-jacente et passée sous silence qui régit les rapports humains. Entre les parents biologiques de Laetitia et sa jumelle Jessica, comme au sein de la famille d’accueil. «Avec ce projet, je voulais redonner vie à Laetitia et montrer pourquoi elle avait pris telle ou telle décision dans les derniers jours de son existence. C’est dérangeant de penser que le nom de son assassin est bien plus mentionné sur le web que le sien.»

 

Laetitia, un portrait sans concession de la France

 

Fidèle de Lestrade, Alix Poisson est au générique, ainsi que Yannick Choirat dans la peau du méticuleux gendarme qui a mené l’enquête, allant, par son opiniâtreté, bien au-delà de son devoir, souligne le réalisateur. La famille de Laetitia a eu un droit de regard sur le scénario et a compris la démarche du feuilleton qui se veut un coup de projecteurs aux «Misérables d’aujourd’hui». Un portrait sans concession de la France. L’œuvre a été applaudie par le public de la Coursive qui lui a quasiment réservé une standing-ovation.

 

Les faits divers étaient à nouveau à l’honneur ce samedi avec La Part du soupçon, inspirée par le cas de l’Américain John List, et très proche de l’affaire Dupont de Ligonnès dont on a vu la décevante mise en images d’M6 en ouverture de cette 21e édition du festival. Kad Merad y joue le rôle d’un homme accusé d’avoir tué sa première famille. Des années plus tard, la justice retrouve la trace alors qu’il a confortablement refait sa vie. La partition très sombre du héros de Baron Noir sur ce téléfilm en deux parties a plutôt convaincu.

 

Un peu de légèreté bienvenue venait de la deuxième dramédie familiale de France 2 Faites des gosses, les vies entremêlées de trois familles dont les enfants fréquentent la même école. Si l’on retrouve certains accents de Fais pas ci, Fais pas ça, c’est que les créateurs ont fait leurs armes sur les aventures des Lepic et des Boulay. Cette nouvelle exploration de la famille s’intéresse toutefois autant au point de vue des parents qu’à celui des enfants. C’est bien troussé, bien joué et quel plaisir d’y trouver Constance Dollé du Village français, en femme au foyer, bourgeoise, d’apparence plutôt effacée mais en fait diablement autoritaire. À noter aussi, Jonathan Lambert, parfait dans le rôle du papa divorcé très libéral et très militant.

 

Un peu alcoolique, un peu dépressif, un peu divorcé

 

Et puisqu’il est question des pères, quelques lignes sur Temps de chien!, à découvrir bientôt sur Arte, épatante tragi-comédie sur la descente aux enfers d’un papa de trois jeunes enfants. Écrite et réalisée par Édouard Deluc, elle raconte l’histoire de Jean, la petite cinquantaine, un peu alcoolique, un peu dépressif, un peu divorcé, totalement fauché et pilote de bateau-mouche. À la rue pour défaut de paiement de loyer, il squattérise l’appartement de sa filleule où il croise le chemin de Victor. Les deux larrons vont bientôt former une sacrée paire, incarnée qui plus est par Philippe Rebbot, étonnant de naturel et de justesse, et Pablo Pauly, son petit frère spirituel. Un de nos coups de cœur de la journée.

 

Une journée qui s’est terminée en beauté avec la projection de l’étonnante série Sauvages de Canal+, une belle rencontre avec Clementine Celarié et Sam Karmann autour de Classe unique, fiction de France 2 traitant à la fois de la désespérance des maires de France, de la crise des migrants et de la fermeture intempestive des écoles rurales. Sans oublier les spectaculaires rassemblements de fans lors des séances de dédicaces des comédiens de Plus belle la vie et Un si grand soleil. Avant la cérémonie de clôture et la révélation du palmarès…